Après six ans dans plusieurs agences de conseil et d’activation en sponsoring sportif en France, j’ai rejoint en 2013, en tant qu’Event Manager, « Formula E Operations », la start-up qui est devenu organisatrice du championnat du monde FIA (Fédération Internationale de l’Automobile) de monoplaces électriques.
Mon expérience en agences a été naturellement très bénéfique pour intégrer une société en création, où nous devions, avec une équipe limitée au démarrage, lancer l’ensemble du projet au niveau international : délivrer les événements promotionnels pour soutenir la recherche de sponsors, sécuriser les villes hôtes pour obtenir un calendrier attractif et cohérent en termes de logistique, valider les tracés des circuits en ville, définir les budgets d’organisation des courses et négocier les contrats avec les promoteurs et organisateurs d’événements.
Aujourd’hui, « Formula E » est une société de 180 salariés avec une capitalisation dépassant le milliard d’euro. Cette réussite est due à l’incroyable talent de l’équipe dirigeante, en particulier de son chairman Alejandro Agag, qui a su séduire de nombreux actionnaires, dont le groupe américain Liberty devenu majoritaire et qui est également propriétaire du championnat du monde de Formule 1. « Formula E » a parallèlement attiré les plus prestigieux constructeurs automobiles comme Jaguar, DS, Audi, BMW, Porsche, Mercedes ou Renault/Nissan qui en fait aujourd’hui un des plateaux le plus relevé de l’ensemble des sports mécaniques en termes de participation directe de constructeurs.
Aujourd’hui, « Formula E » est une société de 180 salariés avec une capitalisation dépassant le milliard d’euro
Le sport automobile est, depuis toujours, un laboratoire de recherche et développement pour l’élaboration des innovations des voitures de route de demain, particulièrement dans l’univers de la compétition automobile électrique qui en était à ses balbutiements. Au début du championnat, chaque pilote devait rouler avec deux voitures pour boucler une course, avec un changement de monture à mi-parcours. Cinq ans plus tard, la deuxième génération « GEN2 » de Formula E est capable de boucler une course de plus de 45 minutes et de rouler sur le mythique circuit de Monaco à plus de 280 kilomètres par heure. La prochaine génération « GEN3 » permettra des arrêts au stand pour recharger les batteries pendant la course, ce qui correspondra à la réalité des véhicules électriques de tourisme devant s’arrêter dans des stations sur les longs trajets. Les constructeurs se sont impliqués dans le championnat Formula E pour obtenir des gains technologiques liés à la compétition de haut niveau, principalement au niveau de la performance des logiciels gérant la puissance et le refroidissement des batteries.
En termes d’impact, le sport automobile arrive derrière le football, sport majeur, mais demeure une plateforme de communication idéale pour les marques souhaitant cibler les hommes, et de plus en plus les femmes. Il permet de communiquer sur des valeurs telles que la technologie, la fiabilité, la vitesse, l’endurance et la performance. Les sponsors ont été séduits par la Formula E, qui leur permet de se différencier car il s’agit d’un sport neuf, environnementale, familiale et jeune ciblant les 15/35 ans. Les freins traditionnels du sport automobile, à savoir la pollution et le bruit ont été levés. Bien qu’il existe des polémiques autour des véhicules électriques, l’ADN de la Formula E est le développement durable. Le championnat a obtenu la norme ISO 20121, puis est parvenu à la neutralité carbone par la compensation des émissions carbone. Formula E est également signataire de la charte des événements éco-responsables définit par le Ministère des Sport Français et l’association WWF, avec quinze engagements à respecter, allant de la gestion des déchets et de l’énergie, à la mise en place d’un programme de volontaires et le respect de l’habitat naturel. La seconde génération de cette charte a été récemment publié en décembre 2021.
En termes d’impact, le sport automobile arrive derrière le football, sport majeur, mais demeure une plateforme de communication idéale pour les marques
L’avantage d’être un événement jeune (huit saisons seulement d’ancienneté), nous a permis de modeler le contenu sportif de façon optimale et d’en commercialiser ses contenus. Formula E a une approche très anglo-saxonne de la commercialisation des droits marketings avec de nombreux « namings ». ABB est le sponsor titre du championnat, TAG Heuer sponsorise le meilleur tour en course, Julius Baer celui de la pole position, DHL le pilote le plus valeureux et Moët et Chandon bien évidemment la cérémonie du podium. Formula E a également créée le FAN BOOST, une innovation sans précédent dans le sport. Il s’agit de la première discipline où les fans peuvent directement influencer le déroulé de la compétition. Grâce aux votes en lignes des fans, cinq pilotes obtiennent un supplément d’énergie pendant cinq secondes, qu’ils peuvent utiliser pendant la course pour dépasser un concurrent.
Le métier de directeur d’événement consiste à piloter les équipes pour délivrer un événement dans les temps et en respectant le budget, tout en satisfaisant les acteurs participants aux revenus de l’événement. Nous mettons tout en œuvre pour que les spectateurs passent un moment inoubliable et regardent un spectacle sportif de qualité. De même, nous choyons particulièrement les invités VIP et les sponsors qui recherchent une visibilité et des retombées media. Sachant également que la très grande majorité des spectateurs de nos évènements dans le monde sont des téléspectateurs, il est primordial de de produire un contenu TV de très haute qualité, les droits TV étant, à terme, la source principale de revenus des disciplines sportives.
Le métier de directeur d’événement consiste à piloter les équipes pour délivrer un événement dans les temps et en respectant le budget, tout en satisfaisant les acteurs participants aux revenus de l’événement
Je parle souvent de trois phases dans mon métier d’organisateur d’événement.
En premier lieu, la préparation de l’événement avec la validation d’un circuit conforme au cahier des charges de la FIA, la définition des emplacements des espaces pour satisfaire les différents publics : le centre de presse pour les journalistes, les hospitalités pour les VIP, les tribunes pour les spectateurs, le centre de retransmissions pour les diffuseurs, les bureaux pour le staff ou l’espace restauration du personnel, les demandes de permis auprès des autorités compétentes, la promotion des ventes pour vendre les billets en tribune et remplir la fan-zone… etc.
Puis la livraison de l’événement qui consiste à opérer un chantier furtif en ville avec la coordination logistique des multiples prestataires allant des travaux publics pour la construction du circuit, au montage de structures temporaires type tentes ou cabines, à l’électrification de l’ensemble du site, jusqu’à la livraison des fleurs pour les hospitalités. Il s’agit de la construction puis du démontage d’un village dans la ville pour deux jours d’événements.
Enfin la phase de gestion de l’événement où la plupart de mon temps se déroule dans le poste de commandement à coordonner le planning des activités, organiser les demandes exceptionnelles, traiter les problèmes techniques ou gérer d’éventuelles crises, comme par exemple, une tempête soudaine qui nous contraint à évacuer la fan zone une heure avant le départ de la course, un véhicule de police qui entre sur le circuit sans autorisation, une personne à mobilité réduite souhaitant traverser le circuit quinze minutes avant le départ, un drapeau rouge décalant la course de trente minutes avec la reprogrammation des concerts après la course, un bagage oublié à proximité du podium quinze minutes avant la cérémonie,… etc.
Ce poste de directeur d’évènement nécessite une parfaite gestion du stress pour savoir gérer n’importe quels imprévus, mais surtout une expertise à 360 degrés afin de connaître l’ensemble des métiers au sein de l’entreprise. Il s’agit de compétences opérationnelles permettant de comprendre les problématiques techniques des collaborateurs et des prestataires. Il s’agit également de compétences en marketing et communication pour développer la marque et l’attractivité auprès des cibles clients. Il s’agit enfin de compétences commerciales pour générer des revenus ou négocier des tarifs avantageux pendant la phase d’achat des prestations.
Chez Formula E, les directeurs d’événement ont la responsabilité totale de deux ou trois épreuves du championnat, idéalement espacés de trois mois afin de pouvoir préparer au mieux chaque épreuve. Le siège social étant basé à Londres en Angleterre, ce poste nécessite de nombreux déplacements en amont des épreuves pour s’assurer de leurs bonnes préparations. Nous élaborons en début de saison un cahier des charges très détaillé qui doit être suivi par les organisateurs locaux sélectionnés. Pour ma part, étant Français et maîtrisant l’espagnol, j’ai organisé ces dernières années les courses de Paris, Marrakech et de Santiago du Chili.
Chez Formula E, les directeurs d’événement ont la responsabilité totale de deux ou trois épreuves du championnat, idéalement espacés de trois mois afin de pouvoir préparer au mieux chaque épreuve
Le sport automobile est une discipline en développement où les championnats traditionnels thermiques sont maintenant concurrencés par les disciplines électriques. Nous avons parlé de la Formula E pour les monoplaces, mais ont été créés également le Pure ETCR pour les véhicules de tourisme, le DAKAR entame sa transition énergetique « Dakar Future » avec l’engagement d’Audi sur des véhicules électrique hybride, et le championnat FIA de voiture électrique de grand tourisme « GT » verra le jour en 2023. En parallèle à l’automobile, le championnat de motos électriques sur circuit (MOTO E ) tourne depuis plusieurs années et un championnat de moto cross électrique E-XPLORER est en train de se mettre en place. L’électrique a dynamisé toute une industrie avec de nouvelles marques de véhicules comme CUPRA (Filiale de SEAT) et de nouvelles disciplines sportives.
Cet univers est passionnant et toujours en forte mutation, sans parler de ces dernières années de pandémie qui nous auront encore plus appris à s’adapter et se remettre en question.